jeudi 14 janvier 2016

Dans le cambouis des réserves

Après l'avoir déjà évoqué plusieurs fois, le chef des armées est revenu sur son projet d'amener les
réserves à 40.000 hommes et femmes, dont un millier pourraient venir abonder Vigipirate/Sentinelle, qui dévore de l'intérieur l'armée d'active, son moral et sa préparation opérationnelle.
Pour cela, il faudrait capturer bien plus de militaires du rang, car ne sont pas les officiers supérieurs -pour lequel on a trop de candidats- qui patrouillent (1). Or, le prix de la journée -et les conditions qui l'accompagnent- ne fait pas rêver, pour un EVAT de réserve, vu que déjà, elle ne fait pas rêver un EVAT d'active.
Il faut aussi pouvoir se libérer pour la durée d'un Sentinelle, dont la durée oscille entre quatre et six semaines, voire plus (ce qui était le cas en novembre-décembre). Difficile, voire irréalisable dans le privé.
Certes, certaines périodes peuvent s'y prêter : un capitaine du 61e RA employé dans l'éducation nationale expliquait en décembre comment il avait pu se libérer pour être employé avec ses réservistes, à Paris. Mais hors des périodes de congés, c'est bien difficile.
De nombreux témoignages remontent d'ailleurs sur les rigidités qui persistent dans... l'administration (qui répond normalement aux injonctions du chef des armées) pour se libérer pour des périodes de réserves. C'est même le cas, dit-on, pour des... civil(e)s du ministère de la Défense.
Le général Christian Thiébault doit d'ailleurs revitaliser ce sujet, mais sa position est délicate, entre un EMA qui cherche des forces vives, un cabinet qui veut être au rendez-vous de la mobilisation présidentielle... et la réalité du sujet. Plusieurs idées sur le feu : un changement de logo, une meilleure visibilité, etc. Pas sûr que cela suffise.
Bref, comme pour bien d'autres sujets de fond du ministère (Louvois, Thémis, le MCO, etc), la harangue ne suffit pas à changer rapidement la donne. Ou, comme on le dit dans la presse, les faits sont têtus.

(1) Ces caractéristiques ne sont pas propres à Sentinelle. Moins le poste est rémunéré, moins on trouve de volontaires pour les tenir. Autre problème, des officiers supérieurs maintenus sur des postes consommateurs d'euros, sans réelle utilité opérationnelle, au détriment de plusieurs postes de réservistes subalternes.

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Mes derniers livres : Le RAID, 30 ans d'opérations (Ed Pierre de Taillac), L'armée au féminin, préface de Jean-Yves Le Drian (Ed Pierre de Taillac) et Commandos du Ciel, préface du général André Lanata (Editions JPO).